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L’article L. 600-8 du code de l’urbanisme – portant sur les formalités à respecter à la suite d’une transaction mettant fin à un recours contre une autorisation d’urbanisme – est-il conforme à la constitution ?

25.09.2023

L’article L. 600-8 du code de l’urbanisme – portant sur les formalités à respecter à la suite d’une transaction mettant fin à un recours contre une autorisation d’urbanisme – est-il conforme à la constitution ?

Décision n° 2023-1060 QPC du 14 septembre 2023

Les transactions, modes alternatifs aux contentieux, connaissent un essor important depuis quelques années permettant en effet de trouver une solution adaptée aux circonstances d’une affaire, ce avec célérité.

Toutefois, les deux premiers alinéas de l’article L. 600-8 du code de l’urbanisme disposent que :

« Toute transaction par laquelle une personne ayant demandé ou ayant l’intention de demander au juge administratif l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager s’engage à se désister de ce recours ou à ne pas introduire de recours en contrepartie du versement d’une somme d’argent ou de l’octroi d’un avantage en nature doit être enregistrée conformément à l’article 635 du code général des impôts.

La contrepartie prévue par une transaction non enregistrée dans le délai d’un mois prévu au même article 635, est réputée sans cause et les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des avantages consentis sont sujettes à répétition. L’action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l’obtention de l’avantage en nature ».

Ainsi et en vertu de l’alinéa 2 de l’article L. 600-8 du code de l’urbanisme, la simple carence de ne pas enregistrer, par le tiers qui conteste l’autorisation d’urbanisme, la transaction auprès des services fiscaux conformément à l’alinéa 1er de l’article L. 600-8 du code de l’urbanisme, permettra au titulaire de l’autorisation d’urbanisme d’obtenir le remboursement de la somme d’argent versé et/ou de l’avantage en nature consenti en application du protocole.

Il s’agit de cette disposition qui était transmise pour contrôle de constitutionnalité aux sages du Palais Royal, au motif qu’elle méconnaitrait les principes d’égalité devant la loi et de droit au recours juridictionnel protégés par la constitution.

Par une décision QPC, publiée au journal officiel le 15 septembre 2023, le conseil constitutionnel a, néanmoins, répondu par la négative considérant l’alinéa 2 de l’article L. 600-8 du code de l’urbanisme conforme à la constitution.

S’agissant, d’une part, du principe d’égalité devant la loi, après avoir rappelé le considérant de principe selon lequel « Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit », le conseil constitutionnel a jugé que :

 « en sanctionnant le défaut d’enregistrement, le législateur a souhaité dissuader la conclusion [des transactions] mettant fin à des instances introduites dans le seul but d’obtenir indûment un gain financier. Il a ainsi entendu limiter les risques particuliers d’incertitude juridique qui pèsent sur les décisions d’urbanisme et lutter contre les recours abusifs »

Aucune méconnaissance de ce principe ne pouvait, par voie de conséquence, être relevée.

Concernant, d’autre part, le droit au recours juridictionnel protégé par la constitution, aucune atteinte n’a été relevée par les sages de la rue de Montpensier pour le motif suivant :

Les dispositions de l’article L. 600-8 « se bornent à sanctionner la méconnaissance de l’obligation d’enregistrement de la transaction par laquelle l’auteur du recours s’est engagé à se désister ». Elles n’ont « par elles-mêmes, ni pour objet ni pour effet d’interdire aux personnes intéressées de former un recours contre une autorisation d’urbanisme ».

La conclusion d’un protocole nécessite donc d’être particulièrement rigoureux tant d’un point de vue de la rédaction que de l’exécution ; une carence pourrait, effectivement, avoir des conclusions irréversibles pour le contestataire d’une autorisation d’urbanisme.